In Memoria : Les Contes de Bois-Brillant
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 Naissance d'une immortalité

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Jacob l'Indécis
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Jacob l'Indécis


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MessageSujet: Naissance d'une immortalité   Naissance d'une immortalité Icon_minitime1Sam 24 Jan - 15:15

Au matin, les portes de la préfecture ashabienne s'ouvrirent violemment. Un jeune prêtre entra, brandissant triomphalement un étui à parchemin en cuir noir à reliure dorée. « Préfet! », hurla-t-il alors. « Préfet, nous avons trouvé quelque chose! » Immédiatement, un individu en tenue de nuit descendit les hautes marches de l'escalier principal. Il les déboula presque. « Qu'avez-vous bien pu trouver qui puisse justifier de me lever de si bonne heure? Il vaudrait mieux pour votre carrière que ce soit une découverte capitale », dit le nouvel arrivant d'un ton autoritaire qui contrastait avec son naturel calme et affectueux. Cette soudaine recrudescence d'autorité témoignait sans aucun doute de sa lascitude à poursuivre les restes de ce qui ne semblait plus qu'être d'un ramassi de racontards. Une fois atteint le seuil des marches, il replaça le pan de sa robe de nuit, se râcla la gorge, lissa sa moustache et tendi la main. Sans se faire plier, le jeune prêtre déposa précotionneusement le rouleau de parchemin qu'il venait de sortir de son étui dans les mains avides du préfet. Celui-ci le déroula comme s'il se fut agit d'un fil d'ariane. Il constata avec joie qu'il n'avait pas été traduit. Il pourrait donc faire montre de son érudition, car il connaissait cet auguste dialecte, une langue parlée au temps des premiers hommes. Aussi, il entama la lecture à haute voix, afin de montrer à tous qu'il méritait bien son titre. Voici en substance ce que pu lire le préfet. Nous nous excusons au près du lecteur si le texte peut sembler incohérent à certains endroits, mais, la connaissance du préfet n'étant pas si assurée quant à cette langue mystérieuse, il s'est bien pu glisser ici et là quelques omissions, erreurs et déformations.

***

Je crois que c'est le vent, au début, qui amena notre sujet. Il n'y avait alors qu'un long transport. Un mouvement rapide, certain, et qui ne laissait paraître rien d'autre que lui-même. Les rafales ne lui inspiraient pas plus de frissons. Enfin, il y avait ce corps; ce corps qui à la fois voulait bouger, mais qui offrait plus de résistence que l'opacité de l'air : c'est une étrange vision que celle d'un être dont il est impossible de dire s'il se meut ou s'il est mû.

Alors même que le fluide aérien éraflait au passage le haut des joues, créant ce faisant une vive sensation de brûlure, un autre s'écoulait au-dedans. PLus calme celui-là, un peu comme une lampée de thé à l'heure du coucher. C'était un souffle, voire peut-être un soufflet. Les pas étaient tout-à-coup moins assurés, sauf que le vent était autrement plus pesant. Un fou n'aurait pas pu s'empêcher de lui crier de se taire. Mais il n'y avait encore que cet enchaînement, bien qu'il fût ralentit. Tout autour, les sapins, pliant sous la réverbération bleutée de la lune sur la neige, s'étaient comme assombris et adoucis à la fois.

Et cette chaleur qui gouttait à l'intérieur n'avait pas de cesse. Pas plus que la giffle du vent. Je ne peux y repenser aujourd'hui qu'avec l'aide du respectueux émmerveillement que me procurent de rares airs de musique. Ce n'est qu'avec la succession des sons que me revient le surgissement. La naissance est plus frappante pour ceux qui y assistent. Je puis me laisser glisser sur la barque de tous ces compositeurs illustres et toujours advient cette sorte de fantasmagorie d'une existence. À chaque fois se répète cette agréable torture. Je voudrais pouvoir le dire enfin, puisque la phrase semble s'être formulée de toute éternité, mais au lieu, c'est la marche hivernale, la maladie, qui montre ses élytres entrouvertes. « Je... J'... » Impossible de terminer l'énoncé. Or, tout y entraîne. Tout est là. L'élypse du voyage, la neige comme la lune, le vent, la musique et son odeur goûteuse; je m'y sens, moi, comme en ma demeure, mais non pas chez moi. Je me vois bien dans le miroir sans pour autant m'y croire. De là, comment pourrais-je jamais y trouver de quoi finir l'assertion? Où trouverai-je ces mots manquant et qui devraient, pourtant, me marquer?

Jacob
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Jacob l'Indécis
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Jacob l'Indécis


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MessageSujet: Re: Naissance d'une immortalité   Naissance d'une immortalité Icon_minitime1Mer 4 Mar - 12:59

Le village était maintenant clos depuis près d'une semaine. Les villageois y étaient pris en hotage par une milice récemment formée par un ordre religieux puissant. On y avait décrété une commission d'enquête sur un phénomène dérangeant : sur le pas du temple dédié à Talos, un étrange parchemin avait commencé à se laisser entrevoir, incrusté dans le marbre. C'était comme s'il avait remonté du sol lui-même pour enfin paraître à travers la pierre. Un léger relief pouvait même être décellé lorsqu'on y passait la main, un peu comme si le parchemin en question était logé juste sous la surface. Dès que la nouvelle s'était répendue, les religieux qui enquêtaient déjà sur une affaire semblable dans un village voisin acoururent avec leur petite armée. Tous furent assignés à résidance afin que nul ne puisse interférer avec le travail d'examination des moines et prêtres. Les rumeurs laissaient entendre qu'il s'agissait peut-être d'une manifestation d'Ao, ce qui aurait pour conséquence de faire s'écrouler bien des religions officielles, planchant sur la tranquille présence du Père des dieux, non sur son activité : si le Dieu Tout Puissant peut être révéré comme n'importe quel autre dieu, s'il accorde le pouvoir de ses manifestations, à quoi bon vénérer une divinité mineure? Ainsi, dans ce petit village, sis tout près de l'ancienne frontière entre le Valbrume et le Valforêt, une rumeur de révolte face aux autorités religieuse grondait. On ne supportait plus l'oppression et la tyrannie. On ne supportait plus l'esclavage au nom de faux dieux...

***

L'écriture mystérieuse en question allait comme suit :

Toujours ce poids sur l’estomac. On pourrait me croire dépressif ou atrabilaire, mais il n’en est rien. Je suis bien plutôt un enfant qu’on prend pour un adulte et que l’on traite comme tel. Je ne suis pas, me semble-t-il, assez solide pour supporter le poids des réflexions, des convictions, des relations, des questions, des divisions, des suppositions ; il me semble que je viens tout juste de poser les pieds dans mon domaine et ce, alors même que je me sens chanceler sous le poids du bagage. Rien autour à quoi se retenir : tout exige d’être consolidé et d’être substantivé par la puissance de la pensée et de l’affectivité ; ce qui, au final, ne fait qu’ajouter à la lassitude du voyageur. Il lui semble que tout est tel que son périple est miné d’avance par le poids des racines qui, bien que censées l’abreuver et le nourrir, ne font que le ralentir et ajouter au bât. Au lieu d’être amené à porter toujours un peu plus par l’habitude de l’exercice, l’étranger en vient à courber le dos à cause du papillon qui repose tranquillement sur son épaule. Il lui dirait bien qu’il n’en peut plus, mais à quoi bon ? Nul ne semble parler sa langue. Et puis, aucune âme ne pourra compatir, car toutes sont plongées dans leur propre marche. D’ailleurs aucune ne comprend son malaise. Elles souffrent toutes, certaines sont parfois paralysées, mais lui continue d’avancer. Ce dont il doute, c’est de voir un jour le fil d’arrivée sans s’être perdu en chemin. L’épuisement est si complet qu’il fait ombrage à l’humain qui le ressent. Ne restera-t-il donc plus qu’une carcasse parlante ? Qu’un funambule ? C’est à cette image que naît la douleur et que prend fin la liberté de s’imaginer. (Une étrange signature évoquant vaguement un J. figure au bas de l'écrit.)
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